Cameroun : Qui était Paul Ayah Abine, un des principaux visages de la contestation anglophone décédé à 74 ans ?
Paul Ayah Abine (Ph)
Paul Ayah Abine, ancien avocat à la Cour suprême du Cameroun, est décédé ce 25 décembre à Buea, principale ville de la région du Sud-ouest ravagée par la crise anglophone depuis fin octobre 2016.
La nouvelle a été rendue publique par sa famille au petit matin du mercredi 25 décembre. Selon ses proches, Paul Ayah Abine s’est éteint des suites de maladie à l’hôpital régional de Buea.
L’opposant Maurice Kamto a rendu un vibrant hommage à Paul Ayah Abine, saluant la mémoire d'un défenseur acharné de la démocratie et des libertés.
Le leader du MRC a souligné que Paul Ayah Abine fut une victime directe du conflit dans les régions anglophones, ayant subi des tortures physiques et morales après son arrestation pour avoir simplement exprimé ses opinions. Selon Maurice Kamto, la souffrance de Paul Ayah Abine s'est prolongée après sa libération. Il était privé de ses droits financiers et notamment de sa pension, l'empêchant d'accéder aux soins médicaux nécessaires.
Kamto a dénoncé l'attitude du pouvoir qui a abandonné cet ancien serviteur loyal à son sort, ainsi que l'indifférence de ses collègues magistrats et de l'élite anglophone.
Il a pointé particulièrement du doigt la cruauté de certains magistrats lors des procès et le mépris affiché par les élites anglophones à son égard.
Le président du MRC rappelle qu'Ayah Paul Abine était un homme de dialogue, privilégiant toujours la modération et la recherche de solutions inclusives pour résoudre la crise anglophone.
Maurice Kamto a déploré la perte d'un homme de conviction qui est resté fidèle à ses idéaux démocratiques jusqu'à son dernier souffle, soulignant le cynisme et la lâcheté qui ont caractérisé le traitement réservé à cet ancien haut magistrat par le système qu'il avait autrefois servi.
L’opposant camerounais a conclu son 'hommage par un appel à poursuivre le combat de cet homme qui a sacrifié son confort et sa santé pour ses convictions démocratiques.
Qui était Paul Ayah Abine ?
Ancien magistrat de 74 ans et ex-membre du RDPC, Paul Ayah Abine s'est établi à Buea dans le sud-ouest après son emprisonnement en 2017 pour ses positions en faveur du fédéralisme. Malgré les pressions et les représailles, incluant le blocage de ses comptes et le non-versement de sa pension, il a choisi de rester au Cameroun contrairement à d'autres figures du mouvement anglophone.
Son parcours professionnel débute en 1976 avec un diplôme de l'université fédérale de Yaoundé, suivi d'une carrière dans la magistrature qui le mène jusqu'à la vice-présidence de la Cour d'appel du Sud-Ouest.
En 2002, il devient député d'Akwaya pour défendre les intérêts de cette région enclavée, mais ses nombreuses tentatives d'audience avec le président Biya restent largement vaines. Sa rupture avec le pouvoir s'amorce en 2008 quand il s'oppose à la modification constitutionnelle permettant à Paul Biya de se représenter, ce qui le conduit à créer son propre parti, le Parti d'action populaire, ou People's Action Party en anglais et à se présenter à la présidentielle de 2011.
Malgré une nomination à la Cour suprême en 2014, il est arrêté en 2017 et emprisonné pendant huit mois au secrétariat d'État à la défense (Sed, quartier général de la gendarmerie nationale). Il maintient sa position sur la nécessité d'un État fédéral à dix États, considérant que la réunification des deux Cameroun n'a jamais été correctement finalisée selon le droit international. Depuis son cabinet d'assistance juridique Justice for All à Buea, il continuait d'observer et de dénoncer les violences qui persistent dans les deux régions majoritairement peuplées de Camerounais anglophones.
Il restait convaincu que la solution à la crise anglophone passe par le dialogue et les négociations, tout en insistant sur la primauté du droit. Bien qu'officiellement retiré de la politique, il continuait de défendre ses convictions sur la cohabitation pacifique entre anglophones et francophones au sein d'une République fédérale.
-Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-oucameroun@koaci.com
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