Côte d'Ivoire : Le Président du Conseil d'Etat à propos de la récurrence des conflits fonciers: «Si l'on n'y prend garde, ils pourraient être à l'origine de graves troubles à l'ordre public »
Le contentieux foncier porté devant le Conseil d’Etat, naît du procès fait à un acte administratif délivré en matière foncière. Le Conseil d’Etat, juge de l’excès de pouvoir, est la juridiction qui contrôle la légalité des actes administratifs relatifs au foncier urbain et au foncier rural, qui sont déférés à son office. Ces actes émanent principalement du ministre en charge de la Construction et de l’Urbanisme, des Préfets et des Sous-préfets, et de la Conservation de la Propriété Foncière et des Hypothèques.
Face au défi de justice que doit relever le Conseil d’Etat, il est apparu opportun à l'institution d’organiser du 27 au 30 juillet 2022 un séminaire dont le thème est : «le foncier, un contentieux en explosion : le regard du Conseil d’Etat ».
L'ouverture de cette rencontre de formation de trois jours a été faite par le Président Patrice Yao Kouakou. Il a à l'occasion relevé que les actions de certaines personnes favorisent les conflits fonciers. Le Président a cité, les autorités coutumières, les classes d'âge de générations et les géomètres experts.
«Les actions des autorités coutumières favorisent également les conflits fonciers. En effet, depuis le désengagement de l’Etat des opérations de lotissements et l’apparition des opérateurs privés, l’on assiste à la prolifération de lotissements villageois. Pour la délivrance de titres de propriété des lots issus de ces lotissements, l’attestation villageoise occupe une place centrale. Ce document, avec son cortège de problèmes, contribue aussi à alimenter le contentieux du foncier. Il n’est pas rare qu’une même parcelle de terrain fasse l’objet de plusieurs attestations d’attribution villageoises. La remise en cause, dans certaines localités, par les classes d’âges ou générations en charge de la gestion du village, des lotissements réalisés par leurs prédécesseurs, contribuent également à la naissance des conflits fonciers. La responsabilité des géomètres experts n’est pas à exclure. L’on observe des chevauchements de lotissements sur la même parcelle de terre. Par ailleurs, des lots sont cédés et des actes administratifs délivrés alors que les lotissements n’ont pas fait l’objet d’approbation », s'est justifié, le Président du Conseil d'Etat.
Les litiges fonciers sont multiformes et impliquent aussi bien les organismes publics, les personnes morales de droit privé ainsi que les individus. Selon Patrice Yao Kouakou, ils opposent parfois des villages, des tribus, des familles et même des membres de la même famille.
Les causes sont diverses. Il a cité, entre autres, la pression foncière due à la raréfaction des terres, la transformation des droits coutumiers en droits modernes, les conflits de compétence et les contrariétés des actes délivrés par les administrations en charge de la gestion du foncier.
«On note également la méconnaissance et le détournement des procédures foncières », a ajouté, le Président.
La conséquence de tout ce qui précède est que les conflits fonciers ont atteint des proportions inquiétantes. Comme l'a indiqué Patrice Yao Kouakou, le contentieux du foncier représente un peu plus de 80 % des procédures portées devant le Conseil d’Etat.
«Si l’on n’y prend garde, ils pourraient être à l’origine de graves troubles à l’ordre public », a-t-il prévenu.
«Nos concitoyens, qui de plus en plus connaissent leurs droits, saisissent la juridiction administrative. Celle-ci apparaît comme le dernier rempart pour mettre fin à leurs différends, à défaut d’un règlement amiable. Cette espérance, légitime, ne peut être une réalité que si les magistrats du Conseil d’Etat sont instruits sur la procédure et sur l’esprit des règles régissant l’établissement des actes administratifs en matière foncière », a déclaré, le Président.
Ce séminaire a pour objectif de réfléchir sur les causes de l’explosion des litiges en matière foncière en relation avec la délivrance des actes qui confèrent des droits fonciers. Il vise également à explorer, avec les parties prenantes, toutes les pistes de solutions qui permettront de réduire les conflits fonciers, et le traitement efficient du contentieux en cette matière.
Au cours de ces trois jours de travaux, les participants auront à réfléchir sur les points tels que, la délivrance des actes en matière foncière, l’intervention du Conservateur de la Propriété Foncière et des Hypothèques dans la délivrance des actes en matière foncière,la typologie des conflits fonciers déférés devant le Conseil d’Etat, les constances jurisprudentielles du Conseil d’Etat en matière de règlement des litiges fonciers et la stratégie pour permettre au Conseil d’Etat de résoudre plus efficacement les litiges fonciers.
La question foncière étant préoccupante, Patrice Yao Kouakou a invité tous les acteurs qui participent à la gestion du foncier, notamment le ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, le Ministère en charge de l’Agriculture et du Développement Rural, le Ministère de l’Intérieur, le Ministère de l’Equipement et de l’Entretien Routier, le Ministère de l’Industrie, les avocats, les notaires, le Cadastre, la Conservation Foncière et des Hypothèques, les géomètres experts, les urbanistes, l’AGEDI, l’AGEF, l’AFOR et les Chefferies villageoises. Ensemble, nous devons réfléchir sur les voies et moyens pour assurer la sécurité foncière et réduire le contentieux en la matière.
Il a exhorté les participants à s'approprier les différentes communications et à participer de façon active aux débats.
«Les résultats de ces assises permettront aux acteurs du Conseil d’Etat d’être instruits sur la délivrance des actes administratifs en matière foncière et de disposer d’outils nécessaires pour le règlement efficace du contentieux foncier », a conclu, le Président du Conseil d'Etat.
Wassimagnon
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