Cameroun : Quand les préjugés ethniques fragmentent le pays, fragilisent le développement et le vivre-ensemble
Monument de la réunification à Yaoundé, symbole du vivre-ensemble (Ph)
Au Cameroun, le vivre-ensemble vole en éclats chaque jour un peu plus. Les revendications communautaires polluent le quotidien des camerounais déjà confrontés aux revendications indépendantistes dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest.
En fin de semaine dernière, des Sawa (non donné aux ressortissants-autochtones du Littoral camerounais Ndlr) de Besseke un quartier de Douala, la métropole économique du Cameroun, ont bruyamment manifesté sous une pluie battante.
La raison de leur colère, la désignation comme chef, d’un camerounais originaire d’une autre région. Concrètement, ces Sawa contestent la nomination par l’administration d’un « allogène » à la tête de leur chefferie de Bonassama dans le quatrième arrondissement de Douala.
«Nous sommes fatigués », « Non aux chefs allogènes chez nous », pouvait-on lire sur leurs pancartes.
« L’arrêté préfectoral qui désigne Monsieur Tanko chef traditionnel de 3e degré du quartier Besseke, constitue une menace grave de trouble à l’ordre public et de déstabilisation du vive ensemble au sein de notre communauté », soutiennent les manifestants Sawa.
Et de poursuivre, « la décision du Préfet est non seulement en porte-à-faux avec les Us et coutumes Sawa, mais elle viole la loi ».
En effet Camille Amadou Tanko est Haoussa. Et, maladroitement présenté comme originaire des trois régions de l’Adamaoua, du Nord et de l’Extrême-nord camerounais.
L’on retrouve les Haoussas en Afrique de l’Ouest, notamment au Niger, Nigeria, également au Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’ Ivoire, Ghana, Soudan, Tchad, Gabon et au Togo. Ils ont donc migré il y a plusieurs siècles vers le Cameroun par le Nigeria et se sont installés d’abord à Garoua (Nord) avant l’arrivée des peulhs, renseignent les historiens.
Affaire Néossi
Il y a quelques semaines, Emmanuel Néossi industriel camerounais né dans l’arrondissement de Kekem, département du Haut-Nkam situé dans la région l’Ouest du pays et qui s’est fait un nom dans la transformation du Cacao, a fait face à une animosité tribale sans précèdent.
L’Etat a attribué à cet industriel une concession de 26000 hectares dans la Vallée du Ntem (Sud). Le promoteur de Neo Industry souhaitait agrandir son empire.
Vent debout, la population s’est opposée à cette concession faite à un « allogène » contraignant le gouvernement à suspendre le bail provisoire qui autorisait Neo Industry à planter 26 000 hectares de cacaoyères sur leurs … « terres.»
Ces « autochtones » du sud avaient évoqué la spoliation de leurs terres par un « allogène » de l’ouest.
« Nous sommes prêts à mourir pour nos terres. Nous sommes dans une mafia. (…) nous ne pouvons pas avoir des propriétaires de terres chez nous qui sont des populations allogènes », avait déclaré, le porte-parole des chefs traditionnels du Sud au Préfet de la Vallée du Ntem.
Dos au mur, le gouvernement a reculé. Le 14 août 2020, Henri Eyébé Ayissi, ministre camerounais des Domaines et des Affaires foncières (Mindcaf), a dans une correspondance annoncé la « suspension des effets du contrat de bail provisoire entre l’Etat et la société Neo Industry SA.»
« Allogène », « Autochtone »
Pour l’homme politique Célestin Djamen, « la tribu est un véritable frein au développement du Cameroun» et même pire qu’un cancer pour « l’unité nationale».
L’opposant suggère de retirer les mots « autochtones » et « allogènes » de la loi fondamentale dans un pays où le discours public promeut le vivre-ensemble.
Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-ou cameroun@koaci.com-
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