Le football camerounais traverse une nouvelle zone de turbulences. Un conflit oppose le Ministre des Sports et la Fédération Camerounaise de Football sur le contrôle des ressources financières allouées aux clubs professionnels. Une série de correspondances officielles de janvier 2025 expose cette lutte de pouvoir qui menace la stabilité du football national.

Le premier acte se joue le 18 janvier 2025. Le Secrétariat Général de la Présidence de la République annonce une subvention exceptionnelle de 560 millions de FCFA. Ces fonds sont destinés au paiement des salaires des joueurs évoluant dans les championnats MTN Elite One et Elite Two pour la saison 2024-2025. Une bouffée d'oxygène attendue pour un secteur en difficulté financière chronique.

La FECAFOOT accueille initialement cette nouvelle avec enthousiasme. Dans son communiqué du 20 janvier, la fédération salue cette initiative gouvernementale. Elle exprime sa reconnaissance envers le Président Paul Biya pour son soutien constant au développement du football professionnel. La fédération voit dans cette subvention un pas important vers la modernisation et l'optimisation de la compétitivité des championnats professionnels.

Mais le 21 janvier, le ministre des Sports bouleverse ce scenario apparemment favorable. Dans un communiqué radio-presse aux allures d'ultimatum, il impose de nouvelles conditions drastiques. Les clubs disposent désormais de 72 heures pour présenter leurs relevés bancaires. Une mesure qui traduit une méfiance à peine voilée envers la gestion financière du football professionnel.

Plus controversé encore, le ministre décide que deux tiers des subventions seront directement gérés par l'Agent Comptable du MINFI auprès de la FECAFOOT. Cette décision représente une ingérence dans l'autonomie financière de la fédération. Le tiers restant sera soumis à des conditions strictes d'utilisation.

La subvention complémentaire de 350 millions FCFA devient également un point de friction. Initialement prévue pour l'organisation matérielle des championnats, sa gestion se trouve aussi sous le contrôle renforcé du ministère. Cette somme, destinée à couvrir la location des stades et le paiement des arbitres, illustre la volonté ministérielle de supervision totale des ressources du football.

Cette série d'événements s'inscrit dans un contexte historique tendu. Les relations entre le Ministère des Sports et la FECAFOOT ont toujours été marquées par des conflits de compétences. La fédération, garante de l'autonomie du football selon les statuts de la FIFA, se trouve régulièrement confrontée aux interventions du pouvoir politique.

Les observateurs du football camerounais y voient une nouvelle tentative de mainmise du ministère sur la gestion du football professionnel. Cette situation ravive le débat sur l'indépendance des instances sportives face au pouvoir politique. Elle pose également la question de la confiance entre les institutions dans la gestion des ressources publiques allouées au sport.

La FECAFOOT se trouve maintenant face à un dilemme. Accepter ces conditions reviendrait à céder une partie de son autonomie. Les refuser pourrait compromettre le versement de subventions vitales pour les clubs professionnels. Cette crise illustre les défis persistants de la gouvernance du football camerounais.

L'avenir proche dira si cette nouvelle confrontation aboutira à un compromis ou si elle marquera le début d'un conflit plus profond entre ces deux institutions du sport camerounais. En attendant, ce sont les clubs et les joueurs qui risquent de faire les frais de ces tensions institutionnelles.

- Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.

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