Côte d'Ivoire : Hausse du crédit d'enlèvement à 50 millions, des courtiers annoncent un sit-in de protestation, mardi au Plateau, la mise en garde du DG des douanes
Alphone Dah
Un mouvement de protestation se profile en Côte d'Ivoire. En effet, le Syndicat Autonome des Transitaires de Côte d'Ivoire (SYNAT-CI) projette d’organiser un sit-in, le mardi 14 janvier 2025, devant les locaux des Douanes, situés au Plateau. Cette action fait suite à la mise en application de la circulaire n° 2334/MFB/DGD du 19 décembre 2024 du Directeur général des Douanes, visant à relever le niveau du crédit d'enlèvement de 25 millions à 50 millions de FCFA. Selon le SYNAT-CI, cette mesure aura de lourdes conséquences pour les PME ivoiriennes du secteur du transit et pourrait même entraîner la fermeture de nombreuses entreprises.
La circulaire du 19 décembre 2024 a pour but de sécuriser les recettes douanières en raison de la croissance économique et du volume élevé des transactions. Elle impose une hausse significative des garanties financières exigées des Commissionnaires en Douane Agréés (CDA), notamment le rehaussement du crédit d'enlèvement, une soumission bancaire annuelle versée au Receveur Principal des Douanes. Cette décision, entrée en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2025, vise à protéger l'État contre les risques d'incidents de paiement en cas de défaillance des entreprises du secteur.
Cependant, le SYNAT-CI, dans un courrier adressé au Ministre des Finances, a dénoncé les impacts négatifs de cette mesure. Selon le syndicat, elle risque de mettre en péril de nombreuses PME ivoiriennes, notamment celles à capitaux exclusivement locaux, qui peinent à réunir ces nouvelles garanties financières dans un délai aussi court. Le syndicat a ainsi décidé d'exercer son droit de manifester, rappelant que cette décision ne tient pas suffisamment compte des réalités du terrain, en particulier pour les petites entreprises du secteur.
Le Directeur général des Douanes, le Général Da Pierre Alphonse, a réagi lors d’une rencontre avec les syndicats de Commissionnaires en Douane agréés. Il a souligné que la mesure avait été le fruit de négociations entre les acteurs concernés, notamment les syndicats des transitaires agréés, et qu’elle visait à renforcer la sécurité des recettes douanières en réponse à l’augmentation des volumes commerciaux et des recettes fiscales. Pour lui, l’objectif est de renforcer la confiance et d’assurer une meilleure gestion des finances publiques, un enjeu crucial pour la prospérité de l’économie nationale.
Le Général Da Pierre Alphonse a également indiqué qu’une partie des acteurs qui protestaient contre cette mesure ne sont pas reconnus dans les fichiers des Douanes, affirmant que certaines organisations, comme le SYNAT-CI, s'immisçaient dans une affaire qui ne les concernait pas. Il a précisé que des mesures de maintien de l'ordre avaient été prises, en coordination avec la police nationale, pour éviter tout trouble à l’ordre public.
«A ce jour, l'administration des douanes compte comme partenaires disposant d'un agrément actif, 272 acteurs actifs. Sur les 272, il y a 49 qui ont un crédit d'enlèvement de 25 millions de FCFA, il y a 20 qui ont un crédit d'enlèvement compris en 25 et 50 millions, il y a 78 qui on un crédit d'enlèvement compris entre 50 millions et 100 millions et il y a 125 qui ont un crédit d'enlèvement de plus de 100 millions de FCFA. (...) Ce que le Directeur général des Douanes peut faire, c'est de prendre toutes les dispositions afin que l'ordre soit respecté pour éviter qu'il y ait des troubles à l'ordre public et que le service se déroule normalement. Ce que je n'accepterai pas c’est ce vandalisme, d'autant que les acteurs du sit-in n'ont rien à avoir avec l'administration des douanes. Je peux vous rassurer que le Directeur général de la police nationale a été saisie pour prendre les dispositions de maintien d'ordre », a conclu, le Général Da Pierre Alphonse.
Du côté des syndicats des Commissionnaires en Douane agréés, la position est claire : la circulaire a été discutée de manière inclusive, avec la participation des acteurs légitimes du secteur.
Boni Kouandé Léonard, Président du Syndicat National des Transitaires de Côte d'Ivoire (SYNATRANS-CI), a rappelé que des réunions avaient été organisées depuis octobre 2024 pour discuter du relèvement des garanties financières, et que des concessions avaient été faites, notamment en matière de délais. Le processus avait permis de réduire l’effort supplémentaire à fournir sur le crédit d'enlèvement à seulement 25 millions de FCFA, une solution qui avait été acceptée par la majorité des parties prenantes.
Le SYNAT-CI estime que la hausse du crédit d'enlèvement à 50 millions de FCFA pourrait aggraver la situation des PME ivoiriennes du secteur, déjà fragilisées par un environnement économique difficile.
Cette mesure est en effet perçue comme un fardeau supplémentaire dans un secteur où de nombreuses entreprises peinent à se conformer aux exigences financières.
Comparativement à d’autres pays de la sous-région, le montant du crédit d’enlèvement en Côte d'Ivoire reste relativement bas, ce qui place les transitaires locaux dans une situation moins contraignante que dans des pays comme le Bénin ou le Sénégal, où les exigences sont beaucoup plus élevées. Cependant, les acteurs locaux estiment que la révision des conditions de garanties financières aurait dû être progressives et mieux adaptées aux réalités des entreprises ivoiriennes.
À l’heure actuelle, la situation reste cordiale, avec un face-à-face entre les autorités douanières et les syndicats des transitaires, mais tendue avec d’autres acteurs, notamment les courtiers non agréés (SYNAT-CI), qui représentent un point de friction.
Les autorités douanières insistent sur la nécessité de respecter les règles d’agrément et de lutter contre les pratiques informelles dans le secteur, mais le SYNAT-CI exprime des inquiétudes sur la durabilité des PME ivoiriennes face à cette nouvelle politique.
Le 14 janvier 2025 marquera probablement un tournant dans ce dossier, alors que les manifestants prévoient de se rassembler pour exprimer leurs mécontentements face à cette décision. La Direction des Douanes, elle, reste déterminée à faire respecter les nouvelles mesures, tout en mettant en place des dispositifs pour garantir le bon ordre et éviter tout débordement.
Wassimagnon
Infos à la une
Communiqués
Côte d'Ivoire
Côte d'Ivoire
Côte d'Ivoire