Dano Djédjé devant la presse (Ph KOACI)

À l’issue de la révision de la liste électorale en Côte d’Ivoire, le Parti des peuples africains - Côte d’Ivoire (PPA-CI), par la voix de son président exécutif, Sébastien Dano Djédjé a pris la parole pour tirer un bilan sans concession de cette opération cruciale pour la vie démocratique du pays.

Devant un parterre de journalistes, hier jeudi 21 novembre 2024, comme sur place constaté par KOACI, le parti de Laurent Gbagbo a exprimé son profond désarroi face à un processus qu’il juge vicié dans sa conception et dans son exécution, dénonçant une série de manquements susceptibles de compromettre les élections présidentielles de 2025.

Initialement prévue du 19 octobre au 10 novembre 2024, et prolongée jusqu’au 17 novembre, cette opération visait à inscrire 4,5 millions de nouveaux électeurs. Pourtant, seuls 800 000 Ivoiriens ont été enregistrés, soit à peine 20 % de l’objectif fixé. Pour le PPA-CI, ce faible taux d’enrôlement est un signe clair d’un processus inadéquat, marqué par des obstacles administratifs, une organisation défaillante et une volonté tacite d’exclusion. « Des milliers d’Ivoiriens ont été empêchés de s’inscrire, réduits au silence par des tracasseries bureaucratiques et un manque de préparation flagrant », a déclaré le président exécutif du parti, fustigeant la responsabilité conjointe de la Commission électorale indépendante (CEI) et du gouvernement.

Le parti a rappelé avoir exprimé, dès le départ, ses inquiétudes sur la faisabilité et l’équité de cette révision. À travers des conférences de presse et des rencontres avec les autorités, le PPA-CI avait pointé du doigt des délais insuffisants, les coûts prohibitifs des documents administratifs nécessaires et des lenteurs dans leur délivrance. « Nous savions que ce processus était voué à l’échec si ces problèmes n’étaient pas résolus », a martelé le président exécutif. Malgré ces alertes, les solutions proposées, notamment une prolongation de trois mois, sont restées lettre morte.

Le PPA-CI ne s’est toutefois pas contenté de critiquer. Fidèle à son engagement en faveur d’une transition démocratique pacifique, il a mobilisé ses militants pour encourager les inscriptions, créant une dynamique observée dans les derniers jours de l’opération. Cependant, cet engouement de dernière minute n’a pas suffi à rattraper les lacunes accumulées. Dans plusieurs centres, les agents étaient débordés, incapables de répondre à la demande croissante. Pire encore, des milliers de primo-votants et de sympathisants du parti, évalués à plus de 120 000 dans 19 régions, n’ont pas pu s’inscrire, faute d’accès aux documents requis ou à cause de pratiques qu’il qualifie de frauduleuses.

Au-delà des frontières ivoiriennes, le tableau est encore plus sombre. Dans les pays voisins tels que le Burkina Faso, le Mali et le Niger, aucun centre d’enrôlement n’a été ouvert, privant de nombreux Ivoiriens de la diaspora de leurs droits. Même au Ghana et au Togo, où quelques centres étaient fonctionnels, les conditions étaient loin d’être optimales. Une situation que le PPA-CI considère comme une violation flagrante des droits des citoyens ivoiriens à l’étranger.

Face à cet état de fait, le parti de l'ancien prisonnier de la cour pénale internationale (CPI) a formulé une série de revendications pour corriger les dysfonctionnements constatés. Parmi elles, une prolongation immédiate et substantielle de la période d’enrôlement, une refonte de la CEI, un audit complet de la liste électorale actuelle, et la gratuité effective des documents administratifs nécessaires à l’inscription. Le parti demande également une enquête approfondie sur les cas de fraude et de corruption qui auraient entaché le processus, notamment le trafic d’influences et le monnayage des récépissés.

Ces exigences s’inscrivent dans une volonté de préserver l’intégrité du processus électoral et de garantir une participation inclusive pour tous les citoyens. Pour la formation politique du natif de Mama, il est inconcevable que les élections présidentielles de 2025 se tiennent sur la base d’une liste électorale aussi imparfaite. « Une démocratie digne de ce nom ne peut exclure une partie de ses citoyens de la prise de décision. Chaque voix compte », a insisté le président exécutif.

Au-delà des critiques, le PPA-CI reste déterminé à jouer son rôle dans l’édification d’une démocratie forte et transparente. Son engagement inébranlable, incarné par le slogan cher à Laurent Gbagbo, « Asseyons-nous et discutons », témoigne d’une volonté de dialogue constructif pour désamorcer les tensions et éviter les crises. Mais il prévient : « Si les lacunes de cette révision ne sont pas corrigées, le risque d’une contestation massive plane sur les prochaines élections. La CEI et le gouvernement porteront l’entière responsabilité de tout trouble à l’ordre public. »

Enfin, le parti a réaffirmé son soutien indéfectible à Laurent Gbagbo, son candidat pour 2025, et son engagement à défendre les droits des Ivoiriens jusqu’au bout. « Nous ne laisserons pas cette affaire sous silence. Notre lutte pour une Côte d’Ivoire juste et équitable se poursuivra avec la même ardeur. »

Dans un pays où le souvenir des crises électorales passées est encore vivace, les paroles du PPA-CI qui a certes perdu de sa superbe dans les urnes où il ne pèse plus qu'à peine 6 %, résonnent comme un avertissement. Pour éviter de replonger dans l’instabilité, il est urgent que les autorités prennent en compte ces revendications et œuvrent à garantir une élection inclusive, transparente et apaisée.

Jean Chresus, Abidjan