Côte d'Ivoire : Tragédie à Adjoskokro, un tradi-praticien emporté par une rivière en crue retrouvé mort
Le corps sans vie du tradi-praticien (Ph KOACI)
C’est un drame qui vient frapper de plein fouet la petite communauté d’Adjoskokro, un campement isolé rattaché à la sous-préfecture de Bléniméhouin, dans le district autonome des montagnes. Le jeudi 3 octobre, les pluies diluviennes qui s’abattent sans relâche sur la région ont causé la mort tragique d’un tradi-praticien local, Yao Kan Jean Claude, emporté par une rivière en crue, sous les yeux impuissants de son jeune fils.
La journée avait commencé comme une autre dans ce village de cultivateurs, où la vie est rythmée par les travaux champêtres et les rites ancestraux. Aux environs de 17 heures, alors que le ciel restait menaçant et que la forêt semblait plus dense que d’habitude, Yao Kan, homme respecté pour ses dons de guérisseur traditionnel, décida d’aller collecter des plantes médicinales. Il était accompagné de son fils, Yao Koffi Samuel, âgé d’à peine 12 ans, qui, à ses côtés, apprenait les rudiments de la tradition. Le père et le fils s’enfoncèrent dans la végétation épaisse, sans se douter du danger mortel qui les guettait.
Les récentes pluies avaient transformé la forêt environnante en un véritable piège. Les rivières qui sillonnent ces terres, normalement calmes, étaient devenues des torrents furieux. L’eau, montée à un niveau alarmant, cernait désormais la végétation, transformant la forêt en un labyrinthe dangereux où chaque pas pouvait être le dernier. Malgré cette menace, Yao Kan, habitué des lieux, ne se laissa pas impressionner et continua sa marche.
Arrivés au bord de la rivière, rendue méconnaissable par la force des vagues et des tourbillons, le tradi-praticien, sans hésiter, s’avança dans l’eau. Peut-être pensait-il que son expérience de la nature le protégerait. Peut-être croyait-il que, comme d’autres fois, il traverserait ce cours d’eau sans encombre. Mais cette fois, la puissance du courant était implacable. À peine avait-il mis les pieds dans l’eau que le flot impétueux l’engloutit.
Yao Kan se débattit, mais la force des eaux déchaînées eut rapidement raison de lui. En quelques instants, il disparut sous les vagues, sous le regard terrifié de son fils. Le jeune Samuel, impuissant, ne put que hurler, avant de courir aussi vite qu’il le pouvait vers le campement, situé à près de deux kilomètres de là. Essoufflé et en larmes, il alerta les villageois, qui, sans perdre une minute, se mobilisèrent.
Les habitants, armés de courage et de détermination, se dirigèrent rapidement vers la rivière, espérant retrouver Yao Kan sain et sauf. Mais les espoirs s’évanouirent rapidement lorsque, après de longues recherches, ils découvrirent son corps sans vie, échoué sur la berge, emporté bien trop loin pour être sauvé.
Le choc fut immense pour la petite communauté d’Adjoskokro. Yao Kan Jean Claude n’était pas seulement un tradi-praticien ; il était un homme de confiance, celui vers qui l’on se tournait pour des conseils, pour soigner les maux avec des plantes que seule sa sagesse savait choisir. Sa disparition laisse un vide immense, non seulement pour son fils, mais pour tout le campement.
La suite des événements se déroula dans une atmosphère de tristesse et de résignation. Après le constat du décès par l’infirmier du centre de santé de Bléniméhouin, assisté par un gendarme de la brigade de Bangolo, la communauté d’Adjoskokro se réunit pour rendre un dernier hommage à Yao Kan. Dans cette terre où il avait toujours vécu, il fut enterré, entouré des siens, dans un silence chargé d’émotion.
Quant à son fils, Samuel, il reste inconsolable. À 12 ans, il a non seulement perdu son père, mais aussi le guide qui l’initiait à une tradition ancestrale. Pour la petite communauté d’allochtones d’Adjoskokro, cette perte est une blessure profonde qui marquera longtemps les esprits.
Jean Chresus, Abidjan
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