Côte d'Ivoire : Commune de Port-Bouët, le quartier Vridi Zimbabwe très bientôt rasé, les populations désemparées demandent à rencontrer Cissé Bacongo
Le quartier Vridi 3, communément appelé « Zimbabwe » dans la commune de Port-Bouët n'existera plus sur la carte du district d'Abidjan dans les jours et heures qui suivent, si le Gouverneur du District veut vraiment mettre à exécution sa menace.
En effet, dans une mise en demeure datée du 19 juillet 2024, adressée aux riverains, le District autonome d'Abidjan les invite à libérer le site qu'ils occupent « de manière anarchique qui ne respecte nullement les normes de la règlementation en matière d'urbanisme et d'habitat ».
En attendant leur déguerpissement, le porte-parole des populations de ce quartier précaire de Port-Bouët, Traoré Saidou, Président du Conseil d'administration (PCA) du Centre de Santé à base communautaire pointe des fumeurs de Vridi 3 était mercredi 24 juillet 2024 face à la presse pour dire que ses camarades et lui sont inquiets et désemparés, même s'ils savent qu'ils partiront tôt ou tard.
En même temps, le porte-parole dénonce la méthode employée par le District autonome d'Abidjan pour faire partir les populations du site.
« Nous voulons rencontrer le politique pour échanger et trouver un terrain d'entente. Nous ne sommes pas contre le déguerpissement mais la méthode ne sied pas. Même si nous nous opposons à cette opération force est à la loi comme mentionné dans la mise en demeure. Nous demandons pardon au District de rentrer en contact avec nous.
Nous avons reçu une mise en demeure, l'opération d'enrôlement suit son cours. Il n'y a plus de fiches d'enrôlement. Les populations sont enrôlées dans des cahiers et sont concernés que les propriétaires des logements. Les locataires ne sont pas pris en compte par cette opération d'enrôlement
Nous prenons à témoin l'opinion nationale et internationale. La population de Vridi 3 est désemparée, elle est inquiète. Un quartier qui a existé depuis 61 ans. S'il doit être détruit, cela doit se faire avec humanisme. C'est ce que nous voulons », a déclaré, Traoré Saïdou, PCA.
Dans la mise en demeure, il est mentionné qu’en cas de refus de la part des riverains, les services compétents du District autonome d'Abidjan seront dans l'obligation de procéder à leur déguerpissement, étant entendu que les frais afférents à cette opération seront entièrement pris à leurs charges.
Cette opération de déguerpissement des populations de Zimbabwe s'inscrit dans le cadre de la lutte contre le désordre urbain, l'insalubrité et l'assainissement dans le District autonome d'Abidjan et le site a été identifié comme zone à risque et constitue un réel danger pour les populations, comme indiqué dans la mise en demeure.
Faux rétorque, Traoré Saïdou qui affirme que depuis 61 ans que le quartier Zimbabwe existe, il n'y a jamais eu de cas d'inondations et soutient que la zone n'est pas à risque, tout en affirmant au passage que depuis que le quartier existe, les populations n'ont jamais reçu de mise en demeure concernant leur déguerpissement.
Malgré cette précision, le District "prie les populations de bien prendre toutes les dispositions utiles, afin de libérer ce site sans délai, dès réception de la mise en demeure".
Les populations soupçonnaient la mairie de Port-Bouët d'être la cause de leur malheur. Selon le porte-parole, une délégation a rencontré le maire le lundi qui les a rassurés que la mairie n'était nullement impliquée dans cette opération de déguerpissement.
Notons que le quartier de Vridi 3 ou Zimbabwe, situé dans la commune de Port-Bouët, a été créé dans le but d'accueillir les pêcheurs traditionnels et les fameuses fumaisons de poissons pour approvisionner les marchés d'Abidjan en poissons fumés et séchés.
Pendant longtemps, le quartier a conservé le nom de Pointe des Fumeurs jusqu'à ce qu'il soit renommé Vridi3 suite au récent découpage de la commune de Port-Bouët en quartiers.
Par ailleurs, dans un plaidoyer, les populations soutiennent que le peuplement du quartier remonte aux années 1965.
"Le quartier présente une grande diversité démographique avec ses 40 000 habitants qui vivent en paix et harmonie. Sur le plan éducatif, on dénombre 2400 élèves répartis dans différentes écoles. Les trois écoles publiques ont un total de 1500 élèves. Ainsi, l'EPP Vridi 3A compte 501 élèves, l'EPP Vridi3B en accueille 387, et l'EPP Municipalité a 494 élèves. La maternelle quant à elle compte 308 élèves, l'école coranique en a 250, et les écoles anglophones accueillent 800 élèves. La diversité des établissements scolaires dans le quartier reflète la richesse de la communauté et l'importance accordée à l'éducation des jeunes générations. Le quartier de Vridi 3, d'un point de vue économique, est un véritable moteur de l'activité des pêcheurs de la région. Avec une station de vente d'essence capable de fournir 35 000 litres aux pêcheurs traditionnels, soit une estimation de 105 000 litres par semaine, les activités de pêche peuvent pleinement se développer et contribuer au rayonnement du pays.
En plus de cela, deux usines de production de glace sont présentes dans le quartier, avec une capacité de production de 20 tonnes par jour. Cette glace est essentielle pour les pirogues des pêcheurs industriels et semi-industriels, leur permettant de conserver leur poisson frais plus longtemps. Le quartier abrite également 450 fours de fumage de poissons, qui offrent un emploi stable à 1500 femmes de la communauté. Parmi ces femmes, 259 se consacrent au commerce du poisson frais, tandis que 1250 se spécialisent dans le poisson fumé.
Ces emplois sont non seulement importants pour l'économie locale, mais aussi pour la stabilité financière de nombreuses familles du quartier. En somme, le quartier de Vridi 3 joue un rôle crucial dans la chaîne de valeur de la pêche dans la région, en offrant des services essentiels aux pêcheurs et en créant des emplois pour de nombreuses personnes de la communauté. Sur le plan religieux, le quartier de Vridi 3 compte 9 mosquées et 23 églises, témoignant de la diversité des croyances présentes dans la communauté. En matière de santé, les habitants bénéficient d'un centre de santé à base communautaire ainsi que d'une maternité disposant d'une dizaine de lits. Ces infrastructures sont essentielles pour assurer le bien-être et la sécurité des résidents. Au plan social, le quartier est majoritairement peuplé de travailleurs du Port, tels que des dockers et d'autres ouvriers du Port. Ces derniers ont choisi de s'installer à Vridi 3 en raison de sa proximité avec leur lieu de travail. Le quartier abrite également de nombreuses structures commerciales, notamment 160 boutiques et ateliers, qui contribuent activement au dynamisme économique de la région. Ces commerces sont soumis à des taxes et droits de l'État, garantissant ainsi une certaine stabilité économique et sociale.
Cependant, le projet de déguerpissement du quartier risque de bouleverser l'ensemble de cette population, ainsi que les activités économiques qui en dépendent. Il est à craindre que cette mesure ait un impact négatif sur l'éducation des nombreux enfants du quartier, qui s'apprêtent à faire leur rentrée prochainement. Il est essentiel de prendre en compte ces aspects sociaux et économiques dans toute décision concernant l'avenir du quartier de Vridi 3 », tel est le cri de cœur des populations désemparées aux autorités ivoiriennes, mentionné dans le plaidoyer.
Wassimagnon
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