Côte d'Ivoire : 50ᵉ anniversaire de l'ICCO, Achi « appelle à un changement de paradigme, car le Monde change et les consommateurs également »
Patrick Achi ce mardi à Abidjan
La célébration du cinquantenaire de l’Organisation Internationale du Cacao (ICCO), couplée avec celle du 10ᵉ anniversaire de l’Agenda Global du Cacao, a lieu en ce moment à Abidjan, capitale économique ivoirienne. La cérémonie d'ouverture de ces festivités a été marquée par la présence des Présidents de Côte d'Ivoire et du Ghana, respectivement premier et deuxième pays producteur mondial de cacao.
Au nom du chef de l'Etat ivoirien, Patrick Achi, Premier ministre de Côte d'Ivoire, a salué les efforts de l'ICCO mais a reconnu que l'organisation n'a pas toujours été au rendez-vous des attentes des producteurs et des consommateurs.
« En 1976, les prix de la fève étaient de 2,5 Dollars le kg. Si l’on tenait compte de l’inflation, toutes choses étant égales par ailleurs, les prix en 2022 seraient de 13 dollars le kg, mais ils sont restés à 2,5 dollars en 2022, soit cinq fois moins que ce qu’ils auraient dû être. Pendant ce temps, le prix de la plaquette de chocolat a été multiplié par 10 en 30 ans, passant de 6,3 dollars le kilogramme en 1990 à 70 dollars aujourd’hui. Le premier sentiment que ces chiffres inspirent, c’est la faible part dans la chaine de valeurs qui revient à celui dont la pénibilité du travail est la plus grande », s'est justifié, le chef du Gouvernement ivoirien.
Pour lui, ce constat est à l’origine de la volonté politique affichée par les Présidents Alassane Ouattara et Nana Akufo-Addo, en tant que premier et deuxième producteur mondial et représentant en cumulé plus de 63 % de la production mondiale, de conjuguer leurs efforts, dans une responsabilité collective, afin de faire bénéficier leurs producteurs de revenus plus importants.
« Ainsi, sur le plan de la durabilité économique, des actions sont d’ores et déjà en cours. La plus emblématique, l’Initiative Côte d’Ivoire-Ghana, vise à accroître le revenu du producteur en mettant en œuvre le Différentiel de revenu décent (DRD) qui représente un montant supplémentaire de 400 dollars par tonne sur le prix du cacao. Ce différentiel est aujourd’hui entièrement versé aux cacaoculteurs, permettant d’amortir les effets néfastes de la fluctuation des prix internationaux. Puisque ces 400 dollars viennent en sus du prix du marché mondial déterminé par les lois de l’offre et de la demande. Qu’il me soit donc permis de rendre hommage ici à l’engagement et à la détermination des Présidents Nana Akufo Addo et Alassane OUATTARA en faveur de cette filière, en faveur de leurs populations », a ajouté, Jérôme-Patrick Achi.
Depuis la première Conférence mondiale sur le cacao et la rédaction de l’Agenda mondial du cacao en novembre 2012, les efforts déployés à l’échelle du secteur se sont multipliés pour améliorer la vie des agriculteurs, des communautés et de l’environnement. Si le courage politique a permis d’obtenir des résultats certains pour les populations, des défis importants restent à relever.
«Le premier défi de cette matière première stratégique réside dans la capacité des pays producteurs à l’intégrer plus loin dans la chaine des valeurs mondiales afin d’arrêter cette fatalité qui voudrait que produire la fève soit le début et la finalité de tout. A titre d’exemple : si nous prenons la chaine des valeurs complète du cacao, de la fève à la tablette de chocolat, elle représente environ 145 Milliards de dollars par an. Si la Côte d’Ivoire, qui produit un peu plus de 40% de la matière première au niveau mondial, pouvait capter seulement 10% de la chaine des valeurs totale, cela représenterait environ 15 Milliards de Dollars par an, soit un accroissement de 25% de son PIB uniquement sur la spéculation du cacao. On entrerait dans la logique où le monde ne serait plus séparé dans un secteur marchand et dans un secteur non marchand mais l’Etat pourrait jouer un rôle de régulateur afin de transférer une partie des produits aux producteurs agricoles leur permettant de gagner beaucoup plus que s’ils ne se contentaient que de planter l’arbre au fruit d’or. C’est ce constat qui sous-tend nos politiques clairement affichées d’industrialisation, toutes les mesures prises par le Président de la République, SEM Alassane Ouattara, dans la même dynamique que le Ghana, pour inciter le secteur privé à investir massivement dans la filière, dans la logique d’une plus grande intégration dans la chaine des valeurs mondiales du cacao », a mentionné, le Premier ministre.
Il reste convaincu qu’au cours des années à venir, la synergie de vision entre les deux Chefs d’Etat et leur attachement tout particulier au bien-être de leurs producteurs conduiront à de nouveaux changements profonds de l’économie cacaoyère. Car, en effet, le monde ne peut pas être divisé entre deux : ceux qui sont condamnés à éternellement produire de la fève et ceux qui sont par excellence les transformateurs et qui génèrent la valeur ajoutée en revenus et en emplois.
«Le deuxième défi de la filière, une économie cacaoyère durable, qui est confrontée dans le contexte mondial actuel à des facteurs tels que la nécessité de la préservation des forêts, avec les menaces liées au changement climatique, l’éradication des pires formes de travail des enfants et l’amélioration des revenus des producteurs. La Côte d’Ivoire et le Ghana, comme tous les pays, adhèrent à cette vision stratégique majeure de la durabilité, pour laquelle il nous faut tous admettre que le troisième facteur, celui de l’amélioration des revenus des producteurs, est souvent la cause des 2 premiers », a-t-il insisté.
Au nom du Président de la République, Patrick Achi a exprimé sa gratitude aux partenaires des pays consommateurs qui partagent avec les pays producteurs cette vision et investissent dans les pays et surtout les encourager pour qu’advienne cette transformation gagnant-gagnant qui consacrera véritablement la durabilité de la filière.
Premier producteur mondial de cacao en 2023, avec une production annuelle estimée à plus de 2,2 millions de tonnes. La Côte d'Ivoire est loin des 60 mille tonnes produites en 1960 à son indépendance.
«La Côte d’Ivoire, c’est la terre du cacao qui sera bientôt le pays de la durabilité parce que nous avons la ferme volonté de faire de la durabilité, le socle et la base de l’avenir de ce secteur. La Côte d’Ivoire, en abritant le siège de l'ICCO, montre sa disponibilité pour contribuer à l’amélioration de la filière », a-t-il souligné.
Il souhaite que ce cinquantenaire soit l’occasion d’un dialogue franc et ouvert. « Il nous faut changer de paradigme, car le Monde change et les consommateurs également. Dans les années à venir, il faudra porter plus encore l’effort sur la création de valeur dans les pays producteurs afin d'accroître la richesse de nos pays, de lutter contre la pauvreté et de créer massivement des emplois pour notre jeunesse », a conclu, Jérôme-Patrick Achi.
Le cacaoyer est un arbre aux fruits d'or. Mais, selon le Professeur Philippe Charlemin, ces fruits ne brillent pas pour tous de la même façon. « Son prix se forme par la rencontre de l'offre et de la demande », a-t-il soutenu. Le Professeur a déploré l'instabilité internationale des prix et souhaite qu'un cadre sécuritaire soit donné aux producteurs pour la durabilité du cacao.
«Les branches du cacaoyer sont ébranlées par les grands vents du marché. Il faut maintenir les filets de la sécurité pour les planteurs en s'efforçant de repartir au mieux ce qu'on peut faire. Allez loin en termes de traçabilité en mettant en évidence les externalités positives », a conclu, Philippe Charlemin.
Wassimagnon
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