Côte d'Ivoire : Conseil Constitutionnel, avant son départ définitif, Mamadou Koné : « Je pars donc sans aucune rancœur, ni rancune, mais plutôt avec le cœur et l'esprit pleins de gratitude »
Mamadou Koné jeudi à Abidjan
Chantal Camara, Présidente du Conseil Constitutionnel, a pris officiellement fonction aujourd'hui à l'issue d'une audience de passation de charges entre son prédécesseur qui aura passé huit ans à la tête de cette institution. Cette prise de fonction intervient seulement 48 heures après la prestation de serment de la nouvelle présidente devant le chef de l'Etat ivoirien.
En prononçant son dernier discours en qualité de Président du Conseil constitutionnel, Mamadou Koné, a reconnu, les qualités de la nouvelle présidente, Namama Chantal Camara et a déploré les vilaineries dont il a été victime durant sa présidence qui a duré 8 ans.
«En effet, Madame la Présidente, votre modestie et votre humilité ont fait passer presque inaperçu que vous avez été la première Magistrate, c’est-à-dire la première femme ivoirienne, à avoir occupé le prestigieux poste de Vice-Présidente de la défunte Cour Suprême et, de ce fait, d’avoir été également la première femme Présidente de la Chambre Judiciaire de cette haute juridiction. En toute discrétion, mais aussi et surtout en toute sérénité, vous avez été la première femme Magistrate de notre pays à avoir pris place dans le prestigieux et très convoité Siège de nos illustres devanciers. (…). Aujourd’hui, vous voici Présidente du Conseil constitutionnel et l’histoire de la Côte d’Ivoire retiendra, pour la postérité, que vous aurez été la première femme à occuper ce haut poste », s'est justifié, le Président sortant.
C’est la toute première fois dans l’histoire de la Côte d’Ivoire, en général, et celle du Conseil constitutionnel, en particulier, que deux Magistrats de la même promotion se succèdent immédiatement à un si haut niveau de la judicature. Les membres de notre promotion en éprouvent une grande et légitime fierté. C’est la raison pour laquelle ils ont tous tenu à venir assister à cette audience, pour vous féliciter, vous témoigner toute leur affection, leur fierté, et vous assurer de tout leur soutien.
Au cours de cette audience de prise de fonction effective, de la nouvelle présidente au Conseil constitutionnel, le Président sortant a appelé Namama Chantal Camara, sur certaines spécificités de la Justice constitutionnelle qui sera désormais son office, par rapport à la Justice judiciaire qu’elle a pratiquée jusqu’à ce jour.
Selon Mamadou Koné, le Conseil constitutionnel exerce son office presque exclusivement sur le terrain politique et cela fait dire à certains auteurs que le Conseil constitutionnel est le Juge du politique.
«Quant à l’opinion publique, en raison de l’implication étroite de la Juridiction constitutionnelle dans l’organisation et le fonctionnement des Institutions politiques, elle finit par considérer, à tort, que les membres du Conseil constitutionnel sont des acteurs politiques à part entière ou, à tout le moins, des intermittents du spectacle politique. Et c’est à l’aune de cette conception que sont appréciées les décisions du Conseil constitutionnel dont les membres finissent par être parfois les victimes collatérales des luttes politiques, avec des conséquences souvent imprévisibles », a-t-il ajouté.
Mamadou Koné a informé son successeur que « la haine à l’égard du Conseil constitutionnel, coupable de contrarier les desseins et les destins, peut aussi déborder sur sa figure emblématique, c’est-à-dire son Président, personne physique, plus concrète que l’Institution, et répondant donc mieux au besoin de disposer d’un adversaire à cibler, contre lequel on peut porter des coups à la dimension de la déception ou de la frustration ressentie ».
« Je ne dis pas cela pour vous effrayer. Mon devoir est juste de vous en informer afin que si, comme je ne le souhaite pas d’ailleurs, cela arrivait quand même, vous n’en soyez ni surprise, ni choquée. Pour mieux crédibiliser leurs discours calomnieux ou, mieux ou pire, pour vous discréditer, vos contempteurs, faisant à dessein l’amalgame entre parenté, amitié, fraternité et militantisme politique, commenceront par décréter, sans aucune preuve, votre appartenance à un parti politique, pour objectif inavoué, de justifier plus aisément leurs déconvenues électorales. Ne soyez guère surprise que, dans l’ambiance sulfureuse des élections, avant ou après le scrutin, parce qu’ils ne trouveront auprès de vous ni compromis, ni compromission, des amis vous quittent, que des parents vous tournent le dos, car on vous prêtera le pouvoir d’imposer vos points de vue à tous les autres membres du Conseil, parce que vous en êtes le premier responsable », a mentionné, le Magistrat Hors Hiérarchie.
Le Président sortant a pris son cas lorsqu’il était à la tête du Conseil Constitutionnel où selon lui son décès a été annoncé et célébré.
« En vous disant de telles choses, je parle en connaissance de cause. Je parle d’or. Dans une formation collégiale de sept (07) Juges, j’ai été personnellement ciblé, mis à l’index, critiqué, insulté, calomnié, diabolisé. Mon décès a même été annoncé et célébré, ma mort physique d’abord, à trois reprises, puis ma mort juridique ensuite, avec la proclamation, avant terme, de la fin de mon mandat. À titre personnel, j’ai fait masse de toutes les malveillances, et les ai jetées à la rivière du pardon des offenses. Je pars donc sans aucune rancœur, ni rancune, mais plutôt avec le cœur et l’esprit pleins de gratitude », a-t-il indiqué.
Alors qu'il a informé qu'il partait du Conseil Constitutionnel sans rancune ni rancœur, Mamadou Koné s'est empressé de préciser aussi, afin que nul n’en ignore, qu’il part également sans aucun regret, relativement aux décisions qui ont été rendues par le Conseil constitutionnel pendant sa présidence.
« Je les assume toutes sans exception. Comment pouvait-il en être autrement quand on sait que chacune d’elles a été arrêtée de manière collégiale, après des délibérations au cours desquelles chaque membre du Conseil a eu à émettre son point de vue, en toute liberté, en toute indépendance, c’est-à-dire sans aucune pression, ni civile, ni militaire, ni d’un quelconque esprit malin, et à la majorité des voix ? Que nul n’attende donc de moi que, dans un futur proche ou lointain, je vienne confesser quelques fautes ou regret que ce soit », a soutenu, le Président sortant.
« Finalement, et vous l’aurez compris, le seul et vrai problème du Conseil constitutionnel, ce sont les élections. L’essentiel à mon sens est que, après chaque décision prise par le Conseil constitutionnel, vous soyez, comme moi, parfaitement en règle avec votre conscience. Les élections sont les périodes les plus troublées et les plus difficiles de l’office du Conseil constitutionnel. Et il en est ainsi en raison des tensions politiques ambiantes et des enjeux que chacun y trouve. En toute circonstance, gardez la sérénité qui sied aux grandes âmes. Comme le disent les anglo-saxons, « Gardez toujours la lèvre supérieure rigide ». Revêtant plutôt le manteau de la détermination du chevalier Bayard, sans peur et sans reproche, vous prendrez en main les commandes du navire, et vous tiendrez fermement le timon. Ni les vagues des attaques, ni la houle ou le roulis des vilains sentiments ne devront vous distraire de votre objectif : le bonheur du peuple ivoirien par la stricte application de la loi. Puis, un jour, vous verrez que la tempête est retombée, car tel a toujours été la vocation d’une tempête, et que le ciel est toujours à sa place. Vous pourrez alors quitter votre poste de commandement et repartir « Une fleur au chapeau, à la bouche, une chanson, un cœur joyeux et sincère… » comme nous l’a enseigné cette comptine de notre enfance », a-t-il insisté.
Le Président Mamdou Koné a déclaré enfin que, « dès que la présente audience sera levée, je ferai mon entrée dans la galerie des souvenirs du Conseil constitutionnel, et je suis heureux que vous soyez la sœur de mon souvenir.
« Soyez une espérance, l’espérance d’une Justice constitutionnelle toujours plus performante, l’espérance d’une Justice constitutionnelle encore plus instrument de paix et de cohésion sociale », a conclu, le Magistrat Hors Hiérarchie, successeur, le Professeur Romain Francis Wodié, à qui il a rendu hommage à travers une minute de silence à l'ouverture de cette audience de prise de fonction de la nouvelle
présidente.
Wassimagnon
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