Côte d'Ivoire : Décès de 6 paturientes entre mai et août, Pierre Dimba N'Gou interpelle les acteurs du système sanitaire : « Il faut avoir le courage de se renforcer quand on a des faiblesses »
L'actualité sanitaire ces derniers mois en Côte d'Ivoire est secouée par une recrudescence des décès maternels constatée dans plusieurs hôpitaux publics à travers le pays. Cette situation naturellement jette l'opprobre sur le système sanitaire ivoirien qui bénéficie pourtant en ce moment d'un investissement conséquent en vue du bien-être des populations.
Devant cette réalité on ne peut plus embarrassante, le ministre de la santé, de l'hygiène publique et de la couverture maladie universelle, Pierre Dimba N'Gou, a convié ce mercredi 08 septembre 2022, l'ensemble des acteurs du système de santé en Côte d'Ivoire, à une rencontre de vérité, qui s'est déroulée à l'Institut National de la Santé Publique (INSP) à Adjamé.
Face à l'assistance composée pour la plupart des membres du cabinet, des Directeurs régionaux, départementaux et centraux en charge de la santé, le ministre Pierre Dimba N'Gou a d'entrée de jeu planté le décor.
" Cette cérémonie a pour objectif d'échanger de façon franche avec l'ensemble du staff du ministère de la santé de l'hygiène publique et de la couverture maladie universelle pour améliorer la qualité des soins et de la sécurité des patients. Le chef de l'État dans sa vision et dans son programme de gouvernement a défini la santé comme un secteur prioritaire. Pour ce faire de nombreux investissements y ont été consacrés pour améliorer notre système de santé. Cette rencontre vise donc a repréciser la responsabilitéde de chacun quelques soit sa position dans la pyramide de notre système et remobiliser l'engagement de chacun dans le sens positif, pour que notre système de santé s'améliore", a -t-il dit.
Le premier responsable en charge de la Santé en Côte d'Ivoire a exprimé son amertume et son angoisse face à l'ampleur des décès des paturientes dans les centres de santé et le désarroi que sème cette situation dans la société.
" Si vous voyez que le décès d'une mère met en branle toute la société, c'est parce qu'effectivement, c'est un drame. Au moment où nous attendons une bonne nouvelle, ce n'est pas une mauvaise nouvelle qui doit nous arriver et à ce niveau, vous devrez comprendre le désarroi des familles et des populations lorsque ces tristes événements surviennent. Il est donc important que nous nous remobilisons pour que cette situation s'améliore", a-t-il poursuivi.
A l'endroit des médecins gynécologues et obstétriciens mis en cause en première ligne dans la survenue de ces décès maternels, Pierre Dimba a fait cette précision : " notre objectif n'est pas de stigmatiser qui que ce soit ou clouer au pilori notre personnel de santé qui est l'essentiel du capital humain que nous avons pour gérer notre ministère", a-t-il déclaré.
Le ministre de la Santé de l'hygiène publique et de la couverture maladie universelle, a également annoncé au cours de cette rencontre, l'accélération de la réforme hospitalière. A l'en croire, les textes ont été arrêtés et le chef de l'État Alassane Ouattara et le Premier ministre Patrick Achi ont instrui, les services compétents lors du dernier conseil des ministres, afin que l'ensemble des textes pour rendre effective cette réforme soient mis en oeuvre.
Il a par la suite, fait cette adresse au personnel de santé dans l'objectif d'un système sanitaire ivoirien efficace et concurrentiel.
" Si vous voulez aller de l'avant, évoluer et changer, il faut d'abord que vous ayez l'information de ce que vous faites. Il faut qu'il y ait une évaluation extérieure de ce que vous faites, parce que vous avez le nez collé au guidon et vous ne savez peut-être pas qu'il y a des aspects qui vous échappent. Il faut avoir le courage de se renforcer quand nous pensons que nous avons des faiblesses. C'est vrai que nous avons fait de très grandes choses, nous avons sauvé de nombreuses vies, mais malheureusement, nous avons encore des faiblesses et nous devons accepter de nous renforcer. Une fois que vous- vous êtes renforcés, c'est là que vous aurez la transformation et que viendra le changement. J'ai bon espoir qu'au sortir de cette rencontre, chacun de nous va prendre des résolutions pour que le système puisse bien se porter", a-t-il indiqué.
Pierre Dimba N'Gou a tout de même fait savoir que le système sanitaire en Côte d'Ivoire en terme de lutte contre la mortalité maternelle est sur la bonne voie, puisque selon les derniers chiffres communiqués par le gouvernement, lors du dernier conseil des ministres, de 600 décès pour 100.000 naissances, la Côte d'Ivoire est passée à 385 décès pour 100000 naissances.
" Nous savons que vous avez un grand potentiel, et donc nous voulons être devant et non pas venir après les autres pays qui ont des revenus ou des moyens moins importants que nous. Le chef de l'État à ce sujet a instruit le premier ministre pour que les moyens soient dégagés pour que nous puissions atteindre cet objectif", a révélé le ministre.
Pour règler le problème du déficit en personnel de santé, et les repartir de façon équitable sur l'ensemble du pays, il a annoncé plusieurs mesures.
" Nous avons entrepris de faire le recensement du personnel et c'est autour de 56000 personnes qui ont été identifiées. Il se trouve qu'il y a 30% qui sont dans un seul district sanitaire, c'est à dire Abidjan. On constate que près de la moitié du personnel de santé se trouve à Abidjan. Il y a des zones de désert où les gens souffrent du manque d'agents de santé. On ne peut pas tout avoir à Abidjan et rien pour les autres"
A cela s'ajoute aussi les mesures pour la mise à disposition de personnel de qualité. Ainsi, de 4000 places disponibles par le passé à l'INFAS, le gouvernement est passé à 8000 places. Au niveau des cadres supérieurs, notamment les médecins, les pharmaciens, les odonto-stomatologies, les dentistes etc, le nombre sera augmenté. Le gouvernement passera de 400 à 1000 et progressivement les choses vont aller à hausse.
Avant que le ministre Pierre Dimba ne prenne la parole au cours de cette rencontre, la responsabilité est revenu au Dr Ablé Kissi, Inspecteur général de la santé, d'interpeller les Directeurs des hôpitaux sur leur système de gouvernance de ces établissements hospitaliers dont ils ont la responsabilité. Il est revenu sur les conditions de décès des 6 paturientes notés entre mai et août 2022 à Adzope, Angré, Bingerville, Issia, Daloa et Yamoussoukro. Des décès liés pour la plupart à des cas de négligence ou d'absence de matériels adéquats. Le professeur Serge Boni, Président de la Société gynécologie obstétrique de Côte d'Ivoire ( SOGOCI) au nom de la structure qu'il dirige, a demandé que la part de responsabilité de chacun soit située dans ces situations. Il a surtout invité les uns et les autres à éviter de stigmatiser les gynécologues, car cela peut créer une tension medico-administrative. Le président de la SOGOCI a par ailleurs proposé les états généraux de la santé de la mère et de l'enfant.
Le représentant de l'OMS en Côte d'Ivoire, Jean-Marie Vianney Yameogo, est y allé aussi de ses propositions pour un système de santé efficace. Pour lui le gros problème de ce système, c'est son incohérence interne.
Wassimagnon
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