Cameroun : Volée de critiques contre l'ingérence étrangère sur la traçabilité des produits du tabac
Assemblée nationale du Cameroun (Ph)
Le gouvernement camerounais a déposé à l’Assemblée nationale plusieurs projets de lois dont celui sur la traçabilité des produits du tabac au terme de longs mois d’hésitations, qui suscite une volée de critiques. L’opposition et la société civile y dénoncent l’ingérence de l’industrie du tabac dans le processus du circuit de contrôle. D’après le gouvernement, la ratification du protocole par le chef de l’Etat, devrait permettre de lutter efficacement contre le commerce illicite des produits du tabac au Cameroun.
C’est la députée Rolande Issi Simgbwa du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN), qui a sonné le tocsin la première.
La députée de l’opposition a suggéré la mise sur pied d’un système informatique rigide avec des mentions claires sur l’étiquetage, les référentiels établis qui permettront de savoir que tel paquet de cigarette a été fabriqué dans tel pays, dans telle usine et même le circuit de sa distribution jusqu’aux consommateurs.
« Ces éléments précis nous permettront de tracer toute la chaîne de la production au consommateur final et aideront ainsi efficacement le pays à lutter contre la contrebande et le commerce illicite », a déclaré l’honorable Rolande Issi.
Main mise
Pour la députée de l’opposition, le projet gouvernemental maintient la main mise de l’industrie du tabac sur le processus de contrôle.
Elle estime que l’industrie du Tabac ne doit pas être impliquée et/ou influencer le choix pour l’acquisition, l’installation du système de contrôle, car elle serait juge et partie.
« Il est hors de question que l’industrie du tabac s’ingère dans le processus de traçabilité, car elle pourrait influencer le choix des mécanismes de contrôle », soutient la députée Rolande Issi.
La société civile camerounaise emboîte le pas à l’opposition. Elle s’oppose à toute ingérence étrangère dans le processus de traçabilité. C’est le cas de Patrice Yantho, Ceo de JMJ Africa.
Cet expert de la société civile, estime que pour « réussir ce protocole, l’Etat doit lui-même contrôler tout le dispositif de traçabilité des cigarettes.»
D’après Patrice Yantho, l’approche de l’Etat du Cameroun sur ce phénomène mondial doit être spécifique, en raison de la nécessité de prise en compte les spécificités du marché local.
« Il serait risqué, dans le cadre de l’implémentation de ce protocole, de faire une sorte de suivisme qui pourrait conduire à un désastre économique et social », affirme Patrice Yantho.
Dangerosité
« En effet, aussi bien l’Etat que l’économie locale gagneraient énormément à ce que 100% du tabac consommé au Cameroun soit produit localement et vendu dans la sous-région. Le Plan directeur national d’industrialisation (Pndi) a prévu de mettre en place des champions nationaux, c’est le lieu d’en faire une démonstration », explique Patrice Yantho.
Selon Patrice Yantho, l’implication de l’industrie du Tabac pourrait fragiliser les producteurs locaux de tabac.
« Dans un pays africain, on a par exemple, vu un prestataire recruté par l’Etat pour le marquage des cigarettes et des liqueurs vendre sa vignette tellement chère que les petits producteurs avaient du mal à suivre le mouvement. C’est ce type d’artifice visant à éliminer des concurrents du marché qu’il faut éviter », souligne l’expert.
Et, il poursuit, «un tel scénario aura des conséquences gravissimes sur notre tissu industriel et la situation socio-économique des intervenants directs et indirect de la chaîne. A cet effet, l’Etat dispose de leviers fiscalo-douaniers et réglementaires, ainsi que des politiques de protectionnisme qu’il faudra manier habilement pour préserver l’industrie, la consommation locale et les consommateurs locaux. »
Pour cet expert, l’Etat doit créer son propre système, une plateforme dont il aura la maîtrise et le contrôle au niveau de son marché local. C’est grâce au contrôle de la plateforme que l’Etat pourra optimiser et maximiser ses retombées fiscalo-douanières issues de la lutte contre le commerce illicite et la contrebande du tabac.
Le gouvernement espère que la ratification du protocole pour l’élimination du commerce illicite des produits du tabac qui bénéficie déjà du statut juridique de la supranationalité, viendra donc compléter, conforter et enrichir cet arsenal, et partant, renforcer la lutte contre le commerce illicite des produits du tabac au Cameroun.
« Cette ratification permettra en même temps de museler davantage le dispositif de lutte contre la fraude et la contrebande des produits du tabac qui représentent une perte annuelle pour le trésor public de l’ordre de 10 milliards FCFA -chiffre de l’année 2018 », fait valoir le ministre du commerce.
Armand Ougock, correspondant permanent de Koaci au Cameroun.
-Joindre la rédaction camerounaise de Koaci au 237 691154277-ou cameroun@koaci.com-
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